Lecteur au rapport!

Japanese Culture
par Paul Varley

JapaneseCultureAprès ma lecture de l’excellent Everyday Life in Traditional Japan de Charles J. Dunn, je craignais que le livre de Varley m’apparaisse sec et doctoral. Mes craintes étaient mal fondées, car je prends autant de plaisir à la lecture de cet ouvrage que j’en ai eu avec le précédent. Ce que Japanese Culture perd en ton naturel, il le reprend largement en profondeur de propos. Mais, malgré la masse considérable d’information supplémentaire, il n’est jamais désagréable. Peu importe le nombre de pages consacrées à la statuaire bouddhiste ou à la poésie de la cour impériale, pas une seule ligne ne donne l’impression d’une besogne dont on se presse de se débarrasser. Pas étonnant donc que cet ouvrage serve de référence pour plusieurs cours sur l’histoire japonaise.

Meurtre dans le boudoir
par Frédéric Lenormand

MeurtreBoudoirAmélie et moi avions été irrémédiablement conquis par La baronne meurt à cinq heures, premier tome de la série historico-policière Voltaire mène l’enquête. Bien que je n’aie eu le temps que de lire le premier chapitre avant de rédiger ceci, je puis d’ores et déjà affirmer que Lenormand n’a rien perdu de sa prose impertinente dans ce deuxième tome. On dirait bien que ma douce moitié et moi allons encore nous battre pour lire le même livre… ou ce serait le cas si je ne l’avait pas distraite avec l’excellent Trafic de reliques d’Ellis Peters que je viens de finir! Héhéhé…

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100 mots sur… Firestorm

FirestormOn reproche souvent au cinéma d’action hongkongais de tout miser sur la violence et les belles images léchées; bref, du cinéma superficiel dénué de toute substance. Afin de démentir cette allégation, voici Firestorm. Avec ses personnages aux pulsions conflictuelles, prisonniers d’une intrigue qui les condamne à un échec inévitable, ce film s’élève au-dessus du simple thriller d’action. Parce que tout est mis en place dès le début au coeur des protagonistes pour les faire tomber de haut et nous faire admirer cette chute, on assiste en fait à une tragédie.

Les dix derniers mots: On trouve de l’art dans les endroits les plus inattendus.

100 mots sur… Sleeping Dogs: Definitive Edition

SleepingDogsLes développeurs de jeux vidéo mettent aujourd’hui davantage d’efforts à donner une dimension humaine à leurs personnages, ce qui paraît le plus souvent dans les dialogues. Bien qu’on n’atteigne pas toujours les tréfonds d’un Resident Evil, force est de constater que la bonne volonté des scribes mène plus souvent qu’autrement à un échec: on reste au niveau d’un nanar filmé pour la télé. Ce n’est heureusement pas le cas avec Sleeping Dogs dont les répliques gardent leur fraicheur et leur authenticité grâce à des scénaristes talentueux et des acteurs sérieux.

Les dix derniers mots: Hormis les boutons à presser, c’est comme un bon film.

100 mots sur… Chew, volume 9: Chicken Tenders

Chew09ChickenTendersChicken Tenders poursuit la tradition de l’humour absurde et des retournements outrageusement dramatiques poussés au comique – et c’est là le problème: c’est maintenant une tradition. Excepté l’intrigue qui fait son chemin, John Layman et Rob Guillory font du sur-place, remâchant les mêmes gags à répétition qui avaient fait la fraîcheur des premiers volumes. Chew est un cas d’exception dans le monde du comic book américain – une série indépendante qui dure – mais il faudrait commencer à penser soit à renouveler les mécanismes, soit à conclure avant d’atteindre le fond du baril.

Les dix derniers mots: Vous connaissez déjà la citation: « Soit on meurt en héros… »

Lecteur au rapport!

Pélagie et le bouledogue blanc
par Boris Akounine

PelagieBouledogueBlancJusqu’à sa moitié, ce roman semblait une énigme policière tout ce qu’il y a de plus typique et j’aime les énigmes policières typiques. Donnez-moi du Miss Marple n’importe quand plutôt que du thriller à l’américaine. Or, la protagoniste Soeur Pélagie parvient à démasquer le meurtrier juste avant le point central, ce qui redirige l’intrigue sur une vague conspiration politico-religieuse. Qu’à cela ne tienne, c’est toujours aussi bien écrit, mais ce soudain changement de cap narratif est quelque peu déstabilisant quand on s’attend à égrener les indices comme un chapelet jusqu’au bout du livre.

ADDENDUM: Tout de suite après avoir publié ce billet, j’ai continué de lire le roman et BOOM! un nouveau meurtre.

Everyday Life in Traditional Japan
par Charles J. Dunn

EverydayLifeTradJapanMalgré sa date de première publication (1973) qui laisse soupçonner quelques inexactitudes dues aux découvertes plus récentes, Everyday Life in Traditional Japan est un ouvrage historique qu’on peine à blâmer tant la lecture en est agréable. Sans aucun jargon ni préoccupations statistiques, Dunn nous livre son histoire du Japon à l’ère des Tokugawa de façon simple, claire et modeste. Il s’agit véritablement d’un livre d’histoire, dans le sens premier du terme. À conseiller pour ceux qui ont en horreur les tableaux de données, les graphiques et les cartes à légendes.

100 mots sur… La baronne meurt à cinq heures

BaronneMeurtCinqHeuresIl y a l’acte et il y a la façon dont il est accompli. Même si l’intrigue policière de Frédéric Lenormand manque de rigueur par moments, on lui pardonne facilement. En effet, on en vient rapidement à considérer la résolution de l’énigme comme une donnée secondaire tant on prend plaisir à seulement lire le texte. Non seulement l’auteur démontre un style personnel vivace et impertinent, mais en plus chaque personnage se révèle une oeuvre d’art accomplie qui nous divertit dans ses actions les plus simples. Voltaire aurait sans doute approuvé.

Les dix derniers mots:  Un triomphe sans déception de la forme sur le fond.

100 mots sur… Le village aux Huit Tombes

VillageHuitTombesBien qu’il se définit comme un roman policier, Le village aux Huit Tombes présente nombre d’éléments qui l’apparentent plus au conte gothique. Un village isolé, une malédiction ancestrale, un trésor caché, une famille inquiétante, un moine fantôme – tout concourt à une ambiance plus proche d’un Poe que d’un Simenon. Et pourtant, énigme policière il y a alors que les victimes s’accumulent et qu’il devient de plus en plus pressant pour le protagoniste de démasquer le meurtrier avant que les villageois apeurés ne décident de se faire justice à ses dépens.

Les dix derniers mots: Un roman parfait pour les nostalgiques de la maison Usher.

100 mots sur… Wonderbook

Wonderbook_Case_r2.inddSi quelqu’un voulait un jour convaincre le monde en général que les écrivains sont des « artistes » dans le sens le plus péjoratif du terme – brouillons, prétentieux et hermétiques – il leur montrera ce livre. Sautant constamment du coq à l’âne, interrompant son propos pour l’entrecouper d’illustrations et de témoignages, échafaudant des théories alambiquées qui n’ont d’application et de fondement que dans les romans de l’auteur, criblant son travail de citations comme un collégien paresseux en manque d’idées, Wonderbook est une tornade impossible à saisir et qui ne laisse rien derrière elle.

Les dix derniers mots: Un beau livre inutile, comme une voile en or massif.

Lecteur au rapport!

Histoire du tonnelier tombé amoureux
par Ihara Saikaku

HistoireTonnelierTombeAmoureuxCette semaine, on change de registre complètement: on passe de la comédie policière au conte classique japonais… et ça exige une certaine adaptation. Le livre contient deux contes et je viens d’en finir le premier. Je… je ne suis pas sûr de ce que j’ai lu. C’est comme si j’avais lu cinq chapitres tirés de cinq livres différents et raboutés l’un à la suite de l’autre. Bon, une chose est certaine: il n’est jamais mauvais de goûter à l’inconnu en littérature. On verra bien quelles leçons je vais tirer de cette expérience…

Morphologie du conte
par Vladimir Propp

MorphologieConteDe la même façon que, côté fiction, je suis passé de l’intrigue policière au conte, côté théorie, je passe des jeux vidéo au formalisme russe. Depuis longtemps, je voulais lire ce texte fondamental de la pensée de Propp parce que ça rejoint la méthode qui m’a été inculquée jadis par mon directeur de bacc quand j’étais étudiant en théâtre. Monsieur Thenon se désespérait devant la tendance fâcheuse qu’avaient les étudiants – et les professeurs! – en lettres d’aborder leur sujet de façon, à ses yeux, trop intuitive. Selon lui, cette négligence minait la crédibilité de leur champ de recherche et invalidait ainsi tout résultat obtenu. Je l’entends encore dire: « Je ne comprends pas qu’à l’université il y ait encore des étudiants qui ne savent pas ce qu’est un protocole de recherche. » Comme Propp, il prônait que, pour mieux servir l’art, il fallait le traiter avec le même respect que l’on accorde aux sujets plus matériels comme le classement des plantes et la chute des corps. Ce n’est qu’au prix de cette rigueur qu’on peut enfin affirmer de véritables constats en littérature.

100 mots sur… L’énigme des Blancs-Manteaux

EnigmeBlancsManteauxContexte intéressant, idée originale, enjeux captivants… mais quelle corvée que de lire ce roman jusqu’au bout! Que s’est-il passé? Jean-François Parot passe constamment par Singapour pour aller de Québec à Montréal; son roman est farci de détours inutiles qui ankylosent son récit et finissent par exaspérer son lecteur. Quand ce n’est pas le protagoniste qui se réserve quelques bons paragraphes pour gloser sur son cheminement personnel et remettre en question sa vision du monde, c’est l’auteur qui déverse sur nous les fruits de ses indéniables et abondantes recherches historiques. Assommant!

Les dix derniers mots: Parot serait bien embêté de se limiter à cent mots.